La junte militaire thaïlandaise cherche toujours les mystérieux auteurs d’une série d’explosions ayant fait quatre morts, entre jeudi 11 et vendredi 12 août. Les enquêteurs ne privilégient pour l’heure aucune piste, mais la junte pointe du doigt celle d’un « sabotage local » plutôt que la main du terrorisme international. Outre la question de la sécurité, les autorités thaïlandaises et les professionnels du tourisme craignent que ces violences aient un impact sur la fréquentation du pays.
« C’est l’oeuvre d’un réseau »
Au total, entre jeudi et vendredi, onze bombes ont explosé à travers cinq provinces du sud de la Thaïlande, notamment dans les stations balnéaires de Hua Hin et Phuket. Ces explosions ont fait quatre morts et plusieurs dizaines de blessés, dont dix touristes étrangers. Les enquêteurs mettent donc tout en oeuvre pour retrouver les responsables de ces attentats. « Aujourd’hui, la police va se concentrer sur le renseignement et la surveillance », a ainsi annoncé le général Pongsapat Pongcharoen, chef adjoint de la police nationale. Des analyses ADN des échantillons prélevés sur les lieux des explosions sont aussi en cours et « des interrogatoires ont eu lieu hier, mais aucun suspect n’a été interpellé » jusqu’ici, a précisé le porte-parole de la police, Piyapan Pingmuang. S’il s’est refusé à donner plus de précisions concernant les personnes interrogées, il a toutefois confirmé que les 11 bombes artisanales déclenchées jeudi et vendredi « sont toutes liées ». « C’est l’oeuvre d’un réseau », a-t-il insisté.
Les experts y hésitent entre une possible vengeance de l’opposition politique (dans un climat de forte répression des libertés depuis le coup d’État de 2014) et une attaque – qui serait sans précédent – des séparatistes musulmans de l’extrême sud du pays. Mais le général Pongsapat a insisté samedi sur le fait que ces attaques n’étaient « pas une extension de la rébellion de l’extrême sud ». Par ailleurs, les autorités ont demandé le renforcement de la sécurité samedi à travers l’ensemble du pays, mettant l’accent sur les lieux publics, gares ou aéroports. Des lieux très fréquentés par les touristes.
« Toute l’opération visait une chose : l’économie du tourisme »
Ces attentats pourraient en effet avoir un impact néfaste sur l’activité touristique du pays. Samedi matin, à Hua Hin, station balnéaire la plus touchée avec deux doubles explosions ayant fait deux morts, la vie semblait revenir à la normale, mais les professionnels du secteur du tourisme s’inquiétaient de la peur des touristes étrangers. « J’ai peur que l’activité ralentisse. Ce matin, il y a moins de monde pour le petit-déjeuner. Je pense qu’ils sont tous partis », déclarait Nai Amporn, propriétaire d’un restaurant de plage à Hua Hin.
Le ministre du Tourisme, Kobkarn Wattanavrangkul, a convoqué la presse en urgence samedi pour tenter d’apaiser les inquiétudes. « Il n’y a pas d’annulations de la part de touristes étrangers », a-t-il assuré, alors même que des agences de voyages suisses, notamment Kuoni, ont d’ores et déjà annoncé que leurs clients ayant réservé des voyages en Thaïlande prévus avant le 15 août pourraient annuler et être remboursés, selon la RTS. « Nos amis étrangers gardent confiance et comprennent la situation en Thaïlande. L’incident aurait pu se passer n’importe où », a-t-il insisté.
Ces attaques mettent en effet sur la brèche la junte militaire, qui a fait de la sécurité et du retour au calme sa plus grande promesse, après des mois de manifestations et de violences de rue avant le coup d’État de mai 2014. Les poseurs de bombes ont touché les généraux là où ils savaient que cela leur ferait le plus mal : le tourisme, secteur-clé sur lequel la junte compte pour redresser une économie atone.
« Toute l’opération visait une chose : l’économie du tourisme. Cela va avoir un impact significatif sur la saison touristique dans le sud cette année jusqu’à début 2017 », estime Anthony Davis, spécialiste des questions de sécurité pour IHS Jane’s. La presse thaïlandaise titrait d’ailleurs samedi sur l’impact sur ce secteur qui représente plus de 10 % de l’économie.
L’attentat d’août 2015 à Bangkok, qui avait fait 20 morts, dont de nombreux touristes chinois, avait eu un impact sur la fréquentation touristique. Celle-ci avait néanmoins repris après quelques mois et cela n’avait pas empêché la Thaïlande de recevoir au final près de 30 millions de visiteurs en 2015, un nouveau record.