Italie : l'avalanche dans les Abruzzes déclenchée par un séisme ?

Vu du ciel, l’hôtel Rigopiano, charmante auberge de bois avec piscine chauffée et sauna située près de Farindola, dans les Abruzzes, n’est plus qu’un amas de débris recouverts d’une épaisse couche de neige. Le choc a été si violent que la structure s’est déplacée d’une dizaine de mètres. Les images diffusées par la chaîne de télévision Rai News montrent le hall en partie dégagé, mais par endroits la neige et les décombres s’accumulent jusqu’au plafond. D’après les premiers témoignages recueillis auprès des services de secours dépêchés sur place, une énorme coulée de neige, très vite mêlée de roche et de terre, est descendue de la pente, s’est abattue sur l’hôtel, et a provoqué son effondrement en le submergeant. Outre la neige, des arbres déracinés, de la roche et de la glace sont tombés sur l’établissement.

Après l’avalanche, les équipes de secours ont ensuite mis plusieurs heures, quasiment toute la nuit, pour atteindre les lieux. Le ciel se purge jour et nuit. Des précipitations colossales ont bloqué la route d’accès à l’établissement. Par endroit, la neige atteint deux à trois mètres de hauteur, comme en Hokkaïdo au Japon, c’est dire. « Lorsque deux mètres de neige s’accumulent, en si peu de temps, sur des pentes très raides avec des inclinaisons à 35 degrés, comme c’est le cas, elle ne demande qu’à partir. Quand le nuage d’aérosols se met en route, il peut atteindre 200 km/heure », analyse Dominique Létang, directeur de l’Association nationale pour l’étude de la neige et des avalanches (Anena). Des ambulances et d’autres véhicules de secours sont toujours bloqués par la neige, à huit kilomètres de l’hôtel.

Les spécialistes sceptiques

Le village de Farindola, situé à 1 200 mètres d’altitude, se trouve à une cinquantaine de kilomètres environ de la région d’Amatrice, touchée mercredi par une série de séismes, mais on ne sait pas encore si l’avalanche a été directement déclenchée par une secousse. « Les nivologues italiens s’inscrivent en faux contre ces rapprochements, explique Dominique Létang. Plusieurs raisons à cela. Il n’y a pas eu simultanéité du séisme et de l’avalanche, et si le séisme était directement responsable, d’autres avalanches se seraient produites ailleurs dans les environs, au même moment. Or ce n’est pas le cas. »

Le séisme, qui a touché le centre de l’Italie mercredi matin, était de faible magnitude (5,3). Il s’est produit à une cinquantaine de kilomètres du lieu de l’avalanche. L’avalanche s’est produite dans la nuit, dix heures après la secousse, soit un long laps de temps. En 2015, le séisme qui avait déclenché des avalanches mortelles au Népal, rayant de la carte le village de Langtang, avait une forte magnitude (7,9). En décembre dernier, toujours au Népal, une petite secousse de 4,5 sur l’échelle de Richter a fait se décrocher un énorme bloc de glace sur les pentes de l’Ama Dablam, emportant plusieurs alpinistes et causant la mort d’un guide népalais. Le décrochage s’est produit presque au même moment que la secousse.

On ignore toujours le bilan définitif des victimes. Selon la Protection civile, citée par la presse, il y avait mercredi 22 clients et 7 membres du personnel à l’hôtel Rigopiano. Deux personnes en hypothermie ont été secourues à l’extérieur et deux victimes ont été extraites des décombres. Mais aucun nouveau signe de vie ne semblait émaner des décombres. Par ailleurs, dans des hameaux isolés, des centaines de personnes restent coupées du monde et des dizaines de milliers de foyers sont toujours privés d’électricité.