Geoffroy Didier : « Rendre anonymes les terroristes, c’est combattre Daech »

Le Point.fr : En quoi anonymiser les terroristes peut-il contribuer à freiner la recrudescence de leurs actes et des drames qu’ils engendrent ?

Geoffroy Didier : Daech recrute des déséquilibrés avides de célébrité en leur promettant la gloire. Certains, qui n’ont pas su donner du sens à leur vie, pourront ainsi, par un acte terroriste, atteindre post mortem la consécration médiatique qu’ils attendaient. D’anonymes, ils passeront à un état de célébrité immédiat. Avant de passer à l’acte, plusieurs terroristes avaient d’ailleurs prévenu leur entourage de leur notoriété à venir. Et, après chaque attentat, le rituel médiatique est le même. Les médias relaient l’identité du terroriste, donnent la parole à sa famille, exposent ses photos de vacances sur papier glacé… Ça suffit !

Je propose d’anonymiser les terroristes pour les empêcher d’accéder à une gloire susceptible de créer un effet de mimétisme. Concrètement, je demande que l’autorité judiciaire et l’ensemble des médias s’engagent à ne plus dévoiler le nom et l’identité visuelle des terroristes. Si cette clause de conscience n’est pas comprise, je soumettrai au Parlement une proposition de loi pour lui donner force contraignante. Dans ce contexte nouveau, il est temps que chacun prenne ses responsabilités.

Ce serait une véritable révolution copernicienne. Hier, le procureur Molins s’est longuement arrêté sur le CV et le pedigree d’Adel Kermiche !

Dans ma proposition, la nationalité du terroriste, son mode de radicalisation et ses antécédents judiciaires pourront être rendus publics au nom de la vérité due aux Français. Mais tout détail risquant de contribuer à en faire un modèle ou une star devra être interdit. Lorsque l’ennemi tente d’imposer l’horreur, toute passivité devient coupable. C’est dans ce même esprit que je propose de condamner pour complicité d’apologie du terrorisme les réseaux sociaux et plateformes de vidéos sur Internet qui ne suppriment pas immédiatement une vidéo ou une photo d’incitation à la haine. Comment accepter que le terroriste de Nice ait pu avoir libre accès à des vidéos de décapitation ? Certains recoins d’Internet sont devenus plus dangereux que Molenbeek ! Les sanctions financières des opérateurs doivent pouvoir aller jusqu’à 5 % de leurs chiffres d’affaires. Ces entreprises privées, aussi puissantes que des États, doivent comprendre que leur logique économique passera désormais après notre sécurité.

Anonymiser les terroristes, n’est-ce pas s’attaquer à la surface des choses plutôt qu’aux racines du mal ?

Rendre anonymes les terroristes est une véritable mesure de combat contre Daech. Elle vient précisément contrer sa stratégie qui consiste à retourner à son profit les principaux outils de la démocratie : médias, réseaux sociaux… Il n’existera jamais de risque zéro. Mais s’entendre dire que sous prétexte qu’il n’existe pas de sécurité absolue il ne faudrait rien imaginer de nouveau est insupportable. Jusqu’ici, que nous ont proposé les gouvernants au lendemain des attentats ? En 2015, l’union nationale. En 2016, les polémiques politiciennes. Ces faux-semblants ont-ils empêché de nouveaux attentats ? Non. Si je suis candidat à la primaire, c’est pour proposer des mesures concrètes aux Français.

Faut-il mettre en place une législation d’exception provisoire pour mieux repérer et mettre hors d’état de nuire les terroristes religieux ?

Je propose d’enfermer dans un centre de rétention tout individu formellement identifié par les services de renseignements comme étant radicalisé ou en voie de radicalisation. La logique qui consiste à attendre qu’un fanatique ait commis un acte terroriste pour l’interpeller et l’enfermer est obsolète. Les immigrés clandestins sont placés dans des centres de rétention administrative par des gouvernements de gauche comme de droite. Qui cela choque-t-il ? Pourquoi ce qui est acceptable pour les sans-papiers ne le serait-il pas pour des apprentis terroristes qui se préparent à tuer nos enfants, nos policiers et nos prêtres ? Nous n’avons plus le choix : protégeons-nous.

Quel sort doit-on réserver aux binationaux coupables d’actes terroristes ?

Englués dans leurs bavardages, beaucoup de dirigeants politiques ont faussé le débat durant des mois en promettant la déchéance de nationalité. Qui peut croire un instant qu’un terroriste refuserait de mourir par peur de perdre sa nationalité française ? La déchéance de nationalité, au même titre que le bracelet électronique, est un outil totalement inadapté aux terroristes, qui n’empêchera jamais concrètement un attentat. Quand arrêtera-t-on donc de faire semblant d’agir ?

S’agissant des étrangers, je souhaite leur expulsion dès leur condamnation en France pour crime ou délit de violence. Après avoir frappé un automobiliste avec une palette de bois et avoir été condamné pour de tels actes, le criminel de Nice a pu rester légalement en France avec une carte de séjour. N’importe quel Français qui commettrait un tel délit à l’étranger serait immédiatement expulsé. Sommes-nous condamnés à être les plus naïfs du monde ? La crédulité et la fatalité ne sont pas un projet de société.